mardi, juin 28, 2005

Quand le capitalisme ralentit la technologie

Je trouve ça vraiment ridicule que le régime de la peur va fonctionner pour mettre un frein important dans l'évolution de la technologie. Je joins ici un article paru sur La Presse Affaire expliquant que la RIAA et la MPAA (ces chers trous d'culs) ont réussit leurs merde et que maintenant, à cause d'eux, la technologie P2P va en être ralentit.


P2P: les poursuites sont autorisées aux É.-U.

Olivier Chicheportiche 27 juin 2005 - 13h12

La Cour suprême des États-Unis vient de porter un méchant coup aux exploitants (éditeurs, distributeurs) des sites d'échange en mode Peer-to-peer. Les neuf juges de la plus haute juridiction américaine ont estimé à l'unanimité que "les développeurs de ces logiciels (P2P) violent la loi fédérale sur le copyright quand ils fournissent aux usagers d'ordinateurs les moyens d'échanger les fichiers de musique et de films téléchargés sur internet", selon le texte de la décision.

En clair, les propriétaires de ces plate-formes pourront être attaqués juridiquement par les Industriels du divertissement. La répression pourra ainsi se porter sur ces exploitants et non plus seulement sur les internautes. Ce qui n'est pas une bonne nouvelle: pour la première fois, il serfa possible d'attaquer les créateurs d'une technologie pour l'usage qui en est fait par des tiers!

La victoire est donc totale pour la RIAA et la MPAA, les deux organismes qui regroupent les différentes Majors de la musique et du cinéma.

L'affaire opposait 28 maisons de disques et studios de cinéma aux exploitants de Grokster et Morpheus, deux sites d'échanges de fichiers en P2P.

L'examen du dossier a débuté en mars dernier. Si l'Industrie américaine du disque et du cinéma préfère depuis de longs mois s'en prendre directement aux adeptes du peer-to-peer, elle n'avait pas abandonné l'idée de condamner directement les éditeurs de ces plate-formes. Après plusieurs échecs judiciaires, les Majors misaient donc sur la Cour Suprême pour faire tomber ces propriétaires.

Une cinquantaine d'argumentaires a été déposée à la Cour par les groupes Intel, Yahoo!, Apple, des lobbys professionnels, associations de consommateurs, musiciens (Elvis Costello, Avril Lavigne), ou encore par le gouvernement américain lui-même qui soutient les plaignants.

Pour l'industrie du divertissement, déboutée en 2003 puis 2004 par les tribunaux, les technologies déployées par Grokster et Morpheus sont néfastes dans la mesure où elles permettent la circulation d'oeuvres sans contrôle: leurs exploitants sont donc responsables si elles laissent passer des chansons ou films piratés.

Laisser les P2P exercer sans contrôle signifierait "la perte de toute protection pour le copyright, dans leur monde tout serait gratuit", déclare Stanley Pierre-Louis, de l'association américaine de l'industrie du disque (RIAA). "Nous aurions alors une baisse des montants investis dans les oeuvres protégées, car si personne ne paie pour les avoir, il n'y a plus aucune raison d'investir davantage".

Pour rétorquer à l'industrie du disque et à Hollywood, Grokster et Morpheus avait reçu le soutien d'une bonne partie de la Silicon Valley. Le monde de la high-tech estime que juger les créateurs d'une technologie responsables de l'usage qui en est fait créerait un grave précédent.

La justice canadienne est d'ailleurs allée dans ce sens en refusant de condamner les éditeurs de P2P. La Cour fédérale de l'Ontario avait jugé que le téléchargement de musique sur l'internet n'était en fait guère différent d'un simple photocopiage de livre dans une bibliothèque. En clair, inutile d'attaquer les fabricants de photocopieuses pour régler le problème de "photocopillage", on ne peut attaquer les créateurs d'une technologie pour l'usage qui en est fait.

"Permettre aux entreprises de divertissement de poursuivre en justice les innovateurs pour chaque violation de la loi va refroidir l'innovation et retarder le secteur dans son ensemble", souligne Fred von Lohmann, de la Fondation Electronic Frontier (EFF). "Le jugement Betamax a été de notre côté depuis 21 ans, et les industries de la technologie et du divertissement ont prospéré pendant ce temps".

Ce "jugement Betamax", rendu par la Cour Suprême en 1984, était le principal argument sur lequel Grokster et Morpheus fondaient leurs espoirs. Il s'agit d'une jurisprudence qui fait qu'on ne peut juger les créateurs d'une technologie responsables de l'usage qui en est fait.

Alors que les studios Universal fustigeaient la technologie du magnétoscope Sony comme la porte ouverte à une vaste entreprise de piratage de K7 vidéo, il avait été décidé que la responsabilité du fabricant n'était pas engagée.

La Cour Suprême avait expliqué à l'époque que le magnétoscope Betamax permettait aussi des usages totalement légaux, comme les enregistrements à des fins privées ou la copie d'oeuvres tombées dans le domaine public. Exactement comme pour le peer-to-peer.

Mais la Cour suprême n'a pas retenu ces arguments. Et sa décision risque d'assombrir considérablement l'avenir de ces réseaux d'échange qui rappelons-le ne servent pas seulement à pirater des fichiers. C'est même tout l'univers du divertissement sur Internet qui risque d'être pénalisé.

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